Un pasteur vous répond

Une perspective chrétienne sur l'hypnose (Épisode 22)

Éthique

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Publié le

16 mars 2016

Un internaute nous demande: "Que penser de l'hypnose, notamment de l'hypnose médicale? Un chrétien peut-il accepter d'être hypnotisé?" Le pasteur Florent Varak commence par recommander quelques lectures. Puis il explique qu'est-ce que l'hypnose. Enfin il conclut en donnant son avis à la lumière de la Bible.

Transcription:

« Cette transcription vous est proposée par les bénévoles de Toutpoursagloire.com. Nous cherchons à garder le style oral des épisodes pour ne pas déformer les propos des intervenants. De même, nous rappelons que ces transcriptions sont mises à disposition mais que les paroles de l’auteur (podcast et vidéo) restent la référence. N’hésitez cependant pas à nous signaler toutes erreurs ou incohérences dans cette transcription. Merci d’avance. »

La question est posée: que penser de l’hypnose, notamment de l’hypnose médicale? Un chrétien peut-il accepter d’être hypnotisé?

C’est une question complexe et je ne suis pas médecin, ni psychiatre, donc mes remarques seront forcément limitées. Mais pour compléter ce que je vais dire rapidement dans un podcast de quelques minutes, je te recommande quelques livres:

  • Le premier c’est celui de Léon Chertok – d’ailleurs ce que Léon Chertok, qui est psychiatre, écrit, te donnera une belle perspective sur ce qui est de l’hypnose. Mais le livre qui m’a le plus intéressé sur cette question s’intitule Hypnose et suggestion, collection Que sais-je?, chez Presses Universitaires de France.
  • Un autre ouvrage, que j’ai récemment découvert, s’intitule Les états modifiés de conscience. C’est Georges Lapassade, que je vais citer dans ce podcast à plusieurs reprises, qui publie ce livre sur un panel de situations mentales un peu plus larges que l’hypnose, mais il parle entre autres de l’hypnose. Également publié chez Presses Universitaires de France.
  • Et puis plus modestement et un peu décalé par rapport à ce thème, le premier livre que j’ai écrit, qui s’intitule La réincarnation, examen des arguments et perspective biblique, aborde la question de l’hypnose assez brièvement dans un chapitre où j’essaye d’évaluer si les souvenirs que l’on croit faire remonter sous hypnose sont valides, et est-ce que la pratique de l’hypnose est une pratique valide pour les souvenirs. Pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté: je ne crois absolument pas aujourd’hui à la réincarnation, même si dans ma vie avant que je devienne chrétien, ça faisait partie un peu de mes points de référence.

Je vais faire quelques remarques sur l’hypnose, ce que je comprends de l’hypnose, avant de donner mon avis et de répondre à cette question.

  • Au tout début de l’hypnose, c’était une pratique qui a été explorée dans sa forme contemporaine par un allemand qui s’appelait Mesmer, qui s’est installé à Paris et qui pensait avoir trouvé un fluide magnétique censé guérir toute maladie. Donc dans les premières expériences sur l’hypnose, cet homme induisait une sorte de crise convulsive chez ses patients, qui se réunissaient dans des salles un peu matelassées parce que les gens faisaient des crises qui conduisaient dans un état proche de l’hypnose. En tout cas, c’était le début de cette réflexion sur l’hypnose. Pour lui, c’était un fluide qui se déversait, un fluide magnétique « animal » (c’est comme ça qu’il le décrit), qui circulait entre les patients et qui les guérissait. Alors les gens qui, à l’époque, se sont intéressés à la question – notamment l’astronome Bailly qui avait été mandaté par Louis XVI pour s’intéresser à ce phénomène -, trouvaient que ce n’était pas très bien pour les mœurs parce qu’il semblait que les attitudes des personnes qui étaient là, et notamment des femmes, étaient un petit peu équivoques. Je ne vais pas aller plus loin dans la description de ce qu’il s’y passait, mais ça semble en tout cas ne pas avoir convaincu les gens qui regardaient ce phénomène. Ils ne voyaient pas un fluide capable de guérir autant que le prétendait Mesmer. Mais c’était le début de l’examen de cette sorte d’état modifié de conscience.
  • Deuxième remarque sur ce qu’est l’hypnose: c’est « un endormissement de l’état de la conscience ordinaire ». Cette définition ne vient pas de moi, elle vient de Lapassade qui dit: « Quand on s’endort (sous-entendu l’endormissement de l’hypnose), l’état de conscience ordinaire s’effondre […]. L’entrée dans le sommeil installe une conduite passive ; la suggestion de dormir encourage une passivité semblable. » Donc il faut bien voir que lorsqu’on met quelqu’un sous état d’hypnose, son état de conscience ordinaire, celui que tu as en m’écoutant, en me voyant, c’est un état qui est endormi, et donc on n’est plus face à une volonté libre de l’individu.
  • Je complète donc avec une troisième remarque, c’est que l’hypnose est un assujettissement à l’hypnotiseur. Lapassade dit: « L’hypnotiseur prend ainsi la place du moi, ou d’une partie du moi: cette hypothèse est dérivée de celle de Freud pour qui, dans l’hypnose, l’opérateur s’installe à la place de l’idéal du moi. Ce remplacement est une dimension centrale de la transe, elle fait son caractère relationnel spécifique. » Peut-être que tu te souviendras du titre du livre de Léon Chertok, Hypnose et Suggestion. C’est vraiment ce que l’on a dans une situation d’hypnose, c’est que tu te places sous la suggestion du praticien qui va te donner une sorte de cadre dans lequel tes pensées vont ensuite évoluer. Alors on est donc dans un schéma où la volonté consciente s’endort et on se place sous la suggestion de l’individu.

On fait quoi avec cette suggestion? Eh bien, je ne parle pas ici des saltimbanques ou des manipulateurs…

  • Mais on va faire une levée d’amnésie. C’est Léon Chertok qui parle de patients qui avaient perdu 10 ans, 15 ans de souvenirs de leur vie, et sous hypnose vont se souvenir de ce qu’ils avaient oublié.
  • On peut faire croire à un certain âge. Par exemple, le praticien va dire à l’individu qu’il a cinq ans, et si on demande à cet individu pourtant adulte de faire un dessin, le dessin qu’il fera reflétera grosso modo le dessin d’un enfant de cinq ans, donc c’est assez amusant.
  • On peut lui faire croire qu’il est blessé. Encore une fois, c’est Léon Chertok qui raconte l’épisode surprenant suivant: il dit prendre une pièce de monnaie en disant à l’individu qu’il avait hypnotisé « cette pièce sort du feu, je la mets sur votre main » et l’individu va développer une cloque qu’il faudra traiter! Une cloque sur sa peau, comme si le corps réagissait en fonction de l’environnement qui lui avait été décrit par le praticien. Rien que cela devrait faire peur, parce que ça montre à quel point on est dépendant de l’éthique solide et sérieuse du praticien pour ne pas être manipulé à des fins très dangereuses pour l’individu. Je connais des gens qui, sous hypnose, ont été violés ou autres… enfin c’est des situations que j’ai rencontré dans la pratique pastorale, de gens qui ensuite étaient vraiment désolés d’avoir commencé un chemin avec une personne qui n’était pas digne de leur confiance.
  • Quatrièmement, l’hypnose requiert la volonté du magnétisé. Je dis ça pour te rassurer. Tu ne peux pas être hypnotisé en te promenant dans la rue et soudainement te trouver face à face avec un hypnotiseur qui ferait « zap! », et tu tomberais sous son charme ou sous son contrôle. Ce n’est pas possible, il faut que tu sois volontaire et participant. On estime que seuls 2 % de la population est capable d’une transe hypnotique profonde. Donc tout ceci est là pour te rassurer, tu n’as pas à craindre être hypnotisé contre ton gré. Il faut que tu participes en te laissant aller à la suggestion de l’autre.

Alors, est-ce qu’un chrétien peut choisir d’être mis sous hypnose? Je n’aime pas être catégorique quand la Bible n’est pas catégorique sur une pratique, parce que on ne connaît pas tous les tenants et les aboutissants d’un sujet. J’ai trouvé sur Internet des gens qui estiment que l’hypnose est neutre, et que c’est la démarche du praticien, l’éthique du praticien, comme la vulnérabilité et la capacité de la personne hypnotisée, qui va rendre valide ou non la pratique de l’hypnose. Je ne partage pas cette neutralité, je trouve que c’est un petit peu trop généreux pour l’hypnose. J’aurais tendance à répondre par la négative, et je vais te donner les raisons, c’est à toi de les examiner pour voir si elles sont valides ou pas.

  1. La première raison c’est que l’hypnose est relativement proche du culte, relativement proche de la possession cultuelle. Je n’ai pas parlé de possession démoniaque, d’accord! j’ai parlé de possession cultuelle. Dans un événement cultuel, les gens se donnent corps et âme littéralement à différentes choses, différentes émotions, différentes abandonnements d’eux-mêmes, et ces deux états sont relativement proches. Du moins c’est ce que Lapassade souligne, je le cite: « En tant que dispositif, l’induction hypnotique et le culte mettent à la disposition d’un sujet un espace dans lequel il peut se laisser aller à la transe. De même qu’un sujet qui fait l’expérience de l’hypnose et accepte de se concentrer sur l’écoute de ce que dit l’expérimentateur est déjà entré en hypnose – de même l’adepte qui se rend à un culte de possession est déjà entré dans l’état de possession ». Cette seule comparaison m’inquiète parce que je me rends compte que l’on est là devant une situation de prise de contrôle. D’ailleurs c’est la définition même de l’hypnose que nous avons relevé.
  2. Deuxième remarque: l’assujettissement au praticien, au fil des sessions, devient de plus en plus rapide. La mise en transe hypnotique au départ est lente, elle exige un abandon de vigilance, de la conscience ordinaire et on n’est pas habitué à cela, donc ça prend du temps de faire confiance au praticien, de se laisser aller. Par contre, au bout de la deuxième, troisième, quatrième mise sous état d’hypnose, ça devient de plus en plus rapide et il peut y avoir des déclencheurs qui sont induits dans la mise sous état d’hypnose. Par exemple, le praticien de l’hypnose peut dire « la prochaine fois, quand je claquerai des doigts, et vous entrerez dans le même état d’hypnose dans lequel vous êtes en ce moment ». Donc ça m’inquiète, ça pose un vrai danger sur la dépendance mentale de l’individu. Et je me dis, qu’est-ce qui se passe lorsque l’on a enfoncé la volonté, la vigilance, de l’individu un certain nombre de fois, est-ce qu’il reste sur un état un petit peu de passivité et de danger vis-à-vis de l’influence d’autres? En tout cas je me posais la question et c’est pour ça que ça m’inquiète un peu comme pratique.

3a. Troisièmement, beaucoup de gens rentrent dans une démarche d’hypnose pour des problématiques qui sont toutes humaines, toutes normales, et qui concernent tous les êtres humains, mais pour lesquelles il y a des remèdes beaucoup plus forts dans les Ecritures. Et la troisième remarque c’est que nous avons tout pleinement dans la prière. Beaucoup commencent leur chemin vers l’hypnose par la sophrologie qui est une technique parfois totalement légitime, de contrôle de soi, de contrôle de la respiration, de contrôle de ses pensées… Je ne veux vraiment pas nécessairement placer une perspective négative sur cette technique, mais c’est une porte d’entrée qui parfois ouvre à d’autres choses. Alors que dit Philippiens 4.6-7? Il dit « Ne vous inquiétez de rien ». Bon, moi je suis une personne inquiète et souvent je m’inquiète. Je dois prendre note de ce que l’apôtre Paul m’écrit ici. « Mais, dit-il, en toutes choses, par la prière et la supplication, avec des actions de grâces, faites connaître à Dieu vos demandes. Et la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées en Christ-Jésus ». Je ne sais pas si tu as remarqué mais nous avons ici quelque chose qui nous permet d’être gardés. La paix de Dieu qui surpasse toute intelligence gardera cœurs et pensées. J’ai suffisamment dans ma vie de prière, dans mon cœur à cœur avec Dieu, tout ce dont j’ai besoin que je pourrais être tenté de trouver dans l’hypnose.

3b. Troisièmement, c’est un corollaire: nous avons tout pleinement en Christ. Tout pleinement, c’est-à-dire tout ce qui contribue à la vie et à la piété. L’apôtre Pierre nous l’écrit en 2 Pierre: « par la connaissance de Dieu ». C’est le témoignage de Colossiens 2.10: nous avons tout pleinement en Jésus-Christ. Son sacrifice est tel, son salut est tel, que nous avons tout ce qui nous permet d’être bâti à l’image de Jésus-Christ. Hébreux 12.1-2 dit la chose suivante: que nous devons courir « avec persévérance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est l’auteur de la foi et qui la mène à la perfection ». Tu as remarqué, Il est l’auteur de la foi et la mène à la perfection. Donc j’ai suffisamment de ma relation avec Christ. Je dois garder les yeux fixés sur Christ, pas les abandonner, pas me laisser aller par toute une série de suggestions qu’un praticien me ferait subir ou me donnerait comme cadre.

  1. Et puis quatrième remarque: nous sommes encouragés au contrôle de nos pensées, et non pas à l’abandon de nos pensées. Contrôle de nos pensées: ça nous vient de 2 Corinthiens 10. 5 par exemple où nous lisons que « Nous renversons les raisonnements et toute hauteur qui s’élèvent contre la connaissance de Dieu, et nous amenons toute pensée captive à l’obéissance au Christ ». Moi je remarque que mes pensées sont capables de vagabonder, d’aller dans des domaines qui sont ni pieux, ni agréables à Dieu, ni utiles, ni édifiants, et je dois les amener régulièrement à la soumission à Christ, même si c’est parfois un effort difficile, là où il y a la droiture, la justice, l’amour, la joie, toutes les choses qui sont liées à la personne du Christ. Et c’est ce que souligne également l’apôtre Pierre en 1 Pierre 1. 13 où il nous est dit: « C’est pourquoi, affermissez votre pensée, soyez sobres et ayez une parfaite espérance en la grâce qui vous sera apportée, lors de la révélation de Jésus-Christ ». Affermir ses pensées c’est-à-dire les ceinturer, pas les abandonner. Donc j’ai de la peine à voir dans un encouragement à abandonner ses pensées et surtout à abandonner ses pensées à une personne tierce.
  2. Et enfin, c’est plus pour le praticien que je vais souligner ça, nous lisons que nous sommes orientés sur la vérité biblique, et non sur la suggestivité d’un autre. Tu te souviens peut-être de 2 Timothée 3.16 où il nous est dit que « Toute Ecriture est inspirée de Dieu ». Donc Dieu nous a laissé une Ecriture inspirée, sans erreur, parfaite, complète, « utile pour enseigner, pour convaincre, pour redresser, pour éduquer dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit adapté et préparé à toute œuvre bonne ». Mais je me dis si vraiment l’hypnose était un élément essentiel, important, pour le développement d’une piété, du caractère, ça serait enseigné dans les Ecritures ; or cela ne l’est pas. Nous avons des vérités sur lesquelles nous concentrer pour pouvoir cheminer dans la vie et faire en sorte que l’on ne soit pas conduits par les pensées des autres, et notamment si on est dans une situation vulnérable qui est l’hypnose, parce que je n’ai plus d’esprit critique. Je me suis laissé assujettir à la volonté et à la pensée d’un tiers. Or il est tout à fait normal que nous subissions en quelque sorte ou que nous suivions toute une série d’influence, mais nous devons avoir la sagesse et le recul d’examiner si ce qui nous est dit est utile, juste, sage. Nous avons un libre arbitre qu’il nous faut utiliser pour éviter de tomber dans les pièges de gens qui voudraient se saisir de notre crédulité ou de notre faiblesse pour nous faire croire des choses ou nous faire faire des choses que plus tard nous serions amenés à regretter.

Voilà pour les raisons pour lesquelles je pense répondre plutôt par la négative. Est-ce qu’un chrétien peut pratiquer l’hypnose ou se faire hypnotiser? Ma réponse serait plutôt négative. Je te donne les raisons; à toi de voir si elles sont bonnes ou mauvaises, et puis bonne réflexion!